Notre lettre 936 publiée le 12 mai 2023
JOURNÉES DESIDERIO DESIDERAVI A PARIS
LE NON- DIALOGUE LITURGIQUE EN PLS
Ce mercredi et ce jeudi 10 et 11 mai le service national de la liturgie pastorale et sacrementelle – « la PLS, ça ne s'invente pas », comme le relève Riposte Catholique, organisait des journées ayant pour thème Desiderio Desideravi. Mais le cardinal Arthur Roche, jadis fossoyeur du diocèse de Leeds dont il a voulu fermer la moitié des paroisses et vendre les églises ainsi abandonnées, a craint d'être quelque peu chahuté à Paris et a préféré envoyer à sa place son secrétaire Mgr Viola, moins médiatique.
Comme les ministres de Macron, poursuivis par des concerts de casseroles en province et qui annulent courageusement leurs déplacements. Du reste, à Leeds, il se retranchait derrière la fonction, dans son évêché dont les coûteux travaux sont à l'origine de la panade financière dans laquelle il a mis le diocèse – quitte à être mauvais, autant réussir à l'être sur tous les plans, et son attaché de presse qui est allé déclarer un jour « une paroisse de 200 fidèles réguliers n'est pas viable ». Depuis 2014, son successeur démontre avec succès que Mgr Roche s'était trompé.
Du reste, le soir du 10 mai, juste après la messe à Saint-Honoré d'Eylau – l'église dite nouvelle, qui a bien un siècle sous sa charpente de fer, des fidèles de la messe traditionnelle de Paris, auxquels Mgr Aupetit, sous couvert de « start-up » a supprimé la moitié des messes, toujours pas rétablies, sont venus avec une banderole et quelques pancartes. Oh, pas des foudres de guerre – tout le monde ne peut pas être breton – mais ils venaient pour dialoguer, pas pour chahuter.
Des fidèles plutôt jeunes dans leur majorité que nous avons interrogé. « Je suis là pour la liberté de la messe traditionnelle », dit l'un d'eux en montrant sa pancarte. « Nos évêques se livrent pour certains d'entre eux à une chasse à l'homme, aux derniers fidèles, aux tradis. C'est complètement débile », continue celui qui « regrette que Mgr Roche ne soit pas venu ».
Un autre jeune homme, « je suis là pour interpeller certains des évêques qui ont affiché leur hostilité à la messe traditionnelle et à la Tradition en général. Cette chasse aux derniers fidèles par certains évêques et responsables d'Eglise qui sont des espèces de boomers laisse pour le moins songeur, c'est complètement délirant ».
Une jeune femme, « je suis là pour revendiquer le droit de continuer à pratiquer le rite traditionnel, qui est le rite de toujurs. Il n'y a pas de raison de l'abroger ou de le jeter aux oubliettes – on voit les fruits de la nouvelle messe et de Vatican II, ou plutôt leur absence ».
Des séminaires qui ferment les uns après les autres (Lille, Metz, Bordeaux en quelques années), des églises qui sonnent creux... et la cathédrale d'Evry. Flamboyant. Ah oui, Mgr Roche. Non, même pas, puisqu'il n'est pas venu.
Un fidèle parisien un peu plus âgé s'exprime à son tour : « ce qu'il y a à savoir, c'est que même aujourd'hui dans l'Eglise latine il y a plusieurs rites. Pourquoi le rite traditionnel serait le seul ne pas avoir le droit d'exister ? ». Oui, surtout quand les mêmes mettent en place le rite zaïrois, et laissent des éléments païens envahir les liturgies en Amérique du Sud et centrale sous couvert d'acculturation avant de sortir prochainement un nouveau rite amazonien..
« Pourquoi une messe qui a des siècles d'existence, qui était sainte pendant des siècles, ne serait plus valide du jour au lendemain ? Ça n'a aucun sens ».
Mais à toutes ces questions pertinentes, les évêques et responsables d'Eglise n'ont pas voulu répondre. Ils n'ont même pas souhaité voir – se barricadant dans l'église, ce qui a laissé le parvis aux manifestants, devant une église close.
Puis ils sont sortis par l'arrière, rue Boissière. Interpellés par les fidèles, deux évêques sont partis presque en courant – et ont même hâté le pas lorsque des fidèles ont demandé qu'ils les bénissent. D'autres se sont échappés l'air penaud par le portillon à côté du parvis, filtré par les employés de la paroisse. Un prêtre parisien a esquivé en courant, pendu à son téléphone.
Et deux prêtres en civil ont lancé aux fidèles, une fois bien à l'abri de l'autre côté de la rue Boissière, « lâchez nous les baskets ! ». C'est précisément ce que réclament les fidèles de la messe tridentine – qu'on les laisse sanctifier selon le rite de toujours et qu'on leur fiche la paix. Bref, pas très Fratelli Tutti, ni très pastoral.
Dans le métro, des participants de province se laissent aller à la discussion. « Notre diocèse n'était pas très chaud, mais comme on est [des laïcs] en responsabilité, nous nous sommes envoyés nous mêmes ». D'autant que les 110 euros par tête, et l'hébergement, c'est le denier du culte qui paie. « Mais bon, il vaut mieux que nos diocésains ne le sachent pas trop. Il y a beaucoup de fantasmes autour de Roche, Desiderio desideravi ».
Alors qu'il y avait – horresco referens pour la génération du Concile – du grégorien et des calices en vermeil à la messe. Si ce n'était les aubes blanches informes, l'on aurait pu se croire chez des tradis...
Laissons la parole pour conclure à un fidèle qui était présent lors de la messe, de la manifestation et de fuite stratégique des participants aux journées Desiderio Desideravi :
« Pour résumer, on a quelques évêques, des prêtres divers, un prélat romain et des laics qui se réunissent entre eux dans une cave – c'est la Grande Crypte, mais c'est une cave quand même, fermée à double tour, avec un prix exorbitant et des inscriptions qui sont interdites au commun des fidèles – c'est tellement mieux et plus dialoguant de parler de liturgie sans les premiers concernés, non ?
Tout ça dans l'arrondissement le plus chic et cher de Paris, parce que appeler à prêcher aux périphéries, c'est bon pour les autres, on n'invite pas un cardinal romain à Stains ou au Val Fourré, non ?
Puis, quand il y a un petit groupe qui vient avec quelques pancartes et une banderole, au lieu d'aller les voir et de discuter – ou d'en désigner un qui se dévoue – ils s'enferment à double tour dans l'église puis s'enfuient par derrière comme des rats. Pour quelqu'un qui ne pratique pas, c'est d'un symbolisme éclatant.
Certains vicaires généraux et évêques qui prennent le temps de réfléchir se demandent comment rétablir la confiance entre fidèles et clercs, entre haut et bas clergé, entre pratiquants et le reste de la population.
Comment voulez faire confiance à des types, tout évêques ou clercs qu'ils soient, qui partent en courant devant des fidèles, et qui courent encore plus vite quand on leur demande une bénédiction ? ».
N'est-ce pas, Monseigneur de Kerimel ?