Notre lettre 715 publiée le 9 octobre 2019

AVIS DE TEMPÊTE
DANS LE DIOCÈSE DE VERSAILLES (2)

Port-Marly, Saint-Germain-en-Laye : et maintenant…

Notre précédente lettre, qui évoquait l’évolution catastrophique de la situation des fidèles attachés à la messe traditionnelle dans le nord du diocèse de Versailles, nous a valu un nombre important de réactions positives et quelques courriers négatifs, certains allant jusqu’à nier la réalité des propos de Louis Renaudin. La situation étant aujourd’hui plus claire, nous avons à nouveau demandé à notre ami de continuer à répondre à nos questions à la lumière des plus récentes informations, qui sont pour beaucoup devenues maintenant « publiques ».


Paix Liturgique – Cher Louis, je reviens sur vos propos de la semaine dernière au sujet des exigences du diocèse quant au partage de l’église Saint-Louis du Port-Marly…

Louis Renaudin – Merci de me permettre de poursuivre mon propos, car désormais nous disposons à ce sujet d’informations plus précises. La première concerne l’exigence d’un partage de l’église : je confirme que cette exigence existe bien mais, devant l’énormité de la demande et les réactions des chanoines de l’Institut du Christ-Roi en charge de la Chapellenie, il semble aujourd’hui que le diocèse de Versailles ne réclamerait plus une plage horaire le dimanche matin pour ceux qu’il appelle « les vrais paroissiens de Port-Marly », mais se replierait vers la récupération du créneau de la messe du dimanche soir.


Paix Liturgique – Cela veut donc dire que si cette exigence était obtenue les chanoines ne pourraient plus célébrer dans leur église « historique » ni la messe du dimanche soir ni bien sur les vêpres et le salut qui la précède ?

Louis Renaudin – Tout à fait ! En y ajoutant aussi les conférences de carême qui ne pourraient plus être données… A l’heure actuelle, il semble que le diocèse et aussi la mairie de Port-Marly ne reculeront pas sur cette exigence


Paix Liturgique – Mais vous disiez la semaine dernière que cela se ferait sans contrepartie ?

Louis Renaudin – J’ai dit qu’à ma connaissance, jusqu’alors, aucune contrepartie n’avait été proposée aux chanoines du Christ-Roi, ce en quoi je me trompais car depuis j’ai appris des choses tout à fait étonnantes.


Paix Liturgique – Lesquelles ?

Louis Renaudin – Et bien, il y a une semaine, il a été proposé à la Chapellenie de se replier pour ses activités et célébrations liturgiques du dimanche après-midi dans les locaux de l’Ecole Saint-Dominique !


Paix Liturgique – Une « contrepartie »… Vous plaisantez !

Louis Renaudin – Pas du tout, et je peux vous dire aussi que lorsque les autorités de l’école Saint-Dominique ont eu connaissance de cette extravagante proposition, elles l’ont immédiatement refusée pour de nombreuses raisons et notamment celle des manquements à l’hygiène qu’une telle célébration engendrerait pour l’école qui est très contrôlée sur cette question. On transformerait une école en église paroissiale !


Paix Liturgique – Mais pourquoi une pareille proposition ?

Louis Renaudin – Elle est tout bénéfice pour ceux que j’appelle, je crois à juste titre, les ennemis de la paix : ils donnent ce qui ne leur appartient pas, et ensuite, ils pourront accuser les paroissiens de la Chapellenie de se replier dans « leur ghetto », comme l’affirme si souvent Mgr. Aumonier, l’actuel évêque de Versailles. Les autorités diocésaines enferment les fidèles traditionnels, et font de leur « fermeture » un crime.


Paix Liturgique – Oh !

Louis Renaudin – Je vous rappelle ce que j’ai dit la semaine dernière au sujet des « négociations » de 1995, qui ont largement capoté devant le refus des autorités diocésaines de « partager » loyalement. En 24 ans, ils n’ont pas bougé d’un pouce.


Paix Liturgique – Mais que faut-il penser de l’idée même du partage de l’église de Saint-Louis du Port-Marly ?

Louis Renaudin - Avant de vous dire ce que j’en pense, rappelons que la promulgation du motu-proprio Summorum Pontificum a généré un grand nombre de nouvelles demandes de célébrations traditionnelles dans le diocèse de Versailles, comme ailleurs. Or, les pasteurs et les curés de la zone nord du diocèse de Versailles ont dit, répété, écrit, que cette application de Summorum Pontificum était déjà mise en œuvre dans l’église de Saint-Louis du Port-Marly qui à la demande des évêques remplissait cette fonction de satisfaire les fidèles attachés à la forme extraordinaire de la liturgie romaine dans le secteur et qu’il n’y avait donc pas de raison d’accorder davantage…


Paix Liturgique – Donc, l’église de Saint-Louis du Port-Marly est le prétexte à ne rien accorder ailleurs, et maintenant, on lui demande en plus de réduire sa voilure, sans accorder davantage ailleurs…

Louis Renaudin – Vous avez tout compris ! Et le coup est d’autant plus insupportable que l’église du Port-Marly confiée à la Chapellenie du Christ-Roi est pleine à craquer malgré ses 4 messes dominicales. Le besoin et la demande des fidèles portent au contraire de ce qu’on leur propose sur de nouvelles célébrations, sans rien enlever à l’église du Port-Marly.


Paix Liturgique – Et que pense la Chapellenie de l’idée d’un partage ?

Louis Renaudin – En fait, depuis les années 90 la Chapellenie dans un souci de paix et de charité a accepté, chaque fois que c’était nécessaire, d’ouvrir son église à la communauté « ordinaire ». Et depuis cette époque, cela se fait notamment à Noël et pour le mercredi des Cendres mais aussi pour des cérémonies plus familiales comme des mariages ou des funérailles.


Paix Liturgique – Mais la Chapellenie serait-elle prête à un partage hebdomadaire, qui plus est le dimanche ?

Louis Renaudin – Je ne sais pas ce qu’accepteraient aujourd’hui les chanoines et le conseil actuel de la Chapellenie mais je pense que leur état d’esprit n’a pas changé depuis 25 ans : un partage pourquoi pas ? Mais s’il permet de rétablir toute la justice…


Paix Liturgique – Qu’est-ce à dire ?

Louis Renaudin – Toutes les parties en présence (tant l’évêché que le presbyterium local et les communautés de fidèles) savent qu’il existe une très forte demande de célébration de liturgie traditionnelle dans le diocèse. Alors, si un partage devait avoir lieu sans contrepartie, on arriverait à cette situation paradoxale d’exiger le partage de l’église du Port-Marly pour une communauté qui en fait n’existe pas, en ignorant l’existence et la demande de nombreux fidèles dans toutes les paroisses du diocèse qui souhaiteraient vivre leur foi catholique au rythme de la forme extraordinaire dans leurs propres paroisses. On prend aux traditionnels, mais on ne leur donne rien…


Paix Liturgique – Mais que faudrait-il faire ?

Louis Renaudin – D’abord, rien ne pourra se faire à long terme sans l’instauration d’un dialogue franc et loyal qui établira une confiance, qui aujourd’hui n’existe pas ou presque pas. Et l’on est en permanence face à des coups tordus, si vous me permettez l’expression, comme celui que j’évoquais au sujet de Saint-Germain dans l’entretien précédent.


Paix Liturgique – C’est-à-dire ?

Louis Renaudin – Je rappelais que, pendant douze ans, des fidèles de bonne volonté ont tenté, on peut dire héroïquement, d’instaurer un dialogue réel et fructueux avec le clergé de Saint-Germain-en-Laye et que pendant douze ans, on n’a cessé de se moquer d’eux …


Paix Liturgique – N’exagérez-vous pas un peu.

Louis Renaudin – Je ne le crois pas ! La meilleure illustration de mon affirmation concerne le lieu où aurait pu être célébrée une messe traditionnelle à St-Germain-en-Laye. Les autorités n’ont cessé depuis douze ans de répéter que « malheureusement » cela n’était pas possible faute d’une église disponible. Dans le même temps, le diocèse refusait de récupérer la chapelle de l’hôpital qui lui était cédée pour 1 € symbolique, au motif… qu’il n’avait pas besoin de ce bâtiment.

De la même manière, l’idée de proposer la chapelle des franciscaines il y a 25 ans pour un sain partage de l’église de Port-Marly a-t-il capoté à l’époque au motif qu’elle était occupée par la communauté des Portugais, lesquels en fait ne l’occupaient pratiquement pas.

Et quand on a fait quitter à la Chapellenie l’église du Port-Marly pour la durée de travaux, il a été miraculeusement découvert que l’église des franciscaines était immédiatement libre de Portugais pour ce transfert…

Et puis, lorsque les fidèles de Saint-Germain, heureux de cette nouvelle situation, ont demandé à leur curé, le Père Faure, si, une fois la Chapellenie retournée à Port-Marly, une messe traditionnelle pourrait être célébrée chaque dimanche dans cette chapelle, il leur fut répondu sèchement pour ne pas dire méchamment : « C’est impossible nous venons de la donner aux Ukrainiens ». Si ces Ukrainiens existent vraiment, ils jouent le rôle que jouaient auparavant les Portugais qui existaient à peine. A défaut, le P. Faure trouverait bien des Polonais, des Belges ou des Chinois.


Paix Liturgique – Alors que préconisez-vous ?

Louis Renaudin – Vous savez, il faut en revenir aux rencontres de 1995, où le père Pottier recherchait honnêtement une solution. Celle-ci ne pouvait être trouvée sans un partage loyal, qui déjà concernait la chapelle des franciscaines de Saint-Germain-en-Laye. Mais déjà cela fut refusée parce qu’il fallait absolument éviter la contagion traditionnaliste qui ne cessait de se répandre dans le diocèse, et donc l’enfermer et la contenir le plus possible dans des lazarets d’où on empêcherait de sortir les pestiférés.

Si aujourd’hui les autorités diocésaines, sans duplicité, veulent récupérer un créneau à Port-Marly, il faut qu’elles proposent à la Chapellenie, en compensation, la possibilité de dire une autre messe en un autre lieu. De toute façon, c’est le bon sens : les fidèles ne vont pas assister aux messes qu’on leur laisserait en montant sur les épaules les uns des autres. Quant à la Chapellenie, lui donner une autre messe lui permettrait de poursuivre et d’améliorer sa mission au service de la communauté de cette région.


Paix Liturgique – Vous avez une idée ?

Louis Renaudin – Cela concerne le diocèse et les chanoines. En revanche je peux dire ce qui n’est pas acceptable : l’idée même d’enfermer la messe enlevée à saint-Dominique, ou encore de la faire dire dans un lieu qui ferait double emploi avec Saint-Louis du Port-Marly, comme à Saint-Vigor de Marly ou pourquoi pas dans la crypte de l’horrible Saint-Thibault. Pourquoi pas sur une péniche, tant qu’on y est ? Tout cela serait perçu comme pure provocation. Ce qu’il faut trouver c’est une église – et il en existe ! - qui se trouverait là où se trouvent un nombre significatif de fidèles de la Chapellenie, non Marly-Portains, ce qui désengorgerait l’église de Port-Marly, permettrait ce fameux partage, puisque partage il faut, et aiderait pas mal de fidèles à ne pas faire de longs transports pour vivre leur vie liturgique.


Paix Liturgique – Et pourquoi pas Saint-Germain ?

Louis Renaudin – Pourquoi pas Saint-Germain. La demande initiale des demandeurs de saint-Germain n’était pas celle-ci, mais comme aucune solution sérieuse et loyale ne leur a été proposée, et qu’au contraire toutes les solutions qu’on évoque aujourd’hui apparaissent comme autant de coups fourrés, je pense en effet que les chanoines devraient assurer la messe à Saint-Germain, tout simplement. C’est sans doute aujourd’hui la seule solution raisonnable à court-terme. Elle correspondrait, par ailleurs, à la logique de la situation géographique de nombreux fidèles de la Chapellenie qui, de fait, sont Saint-Germinois…


Paix Liturgique – Mais le père Faure a déclaré que les demandeurs n’étaient pas concernés par le motu proprio Summorum Pontificum, car ils n’étaient pas des pratiquants de sa paroisse.

Louis Renaudin – En fait, il a raison et tort à la fois. Tort, car il ne sait pas, ou ne veut pas savoir, que nombre de ses propres fidèles, je précise ceux de sa propre paroisse, choisiraient d’aller à la messe traditionnelle si celle-ci était célébrée à saint-Germain d’une manière pacifique tranquille. Il a cependant raison pour les autres, car le plus grand nombre des Saint-Germanois qui iraient à une célébration traditionnelle dans leur ville n’ont malheureusement actuellement pas de rapport avec la paroisse de leur domicile, à Saint-Germain, soit qu’ils fréquentent actuellement d’autres paroisses des environs ( je pense à saint-Wandrille du Pecq) soit qu’ils sont des fidèles de chapelles traditionnelles d’ici ou d’ailleurs qui souhaiteraient ardemment pouvoir vivre leur foi dans leur ville !


Paix Liturgique – En conclusion.

Louis Renaudin – Je crois sincèrement que des solutions existent et que les pasteurs de bonne volonté sauront les trouver. Si cela n’était pas le cas, eh bien ils n’auraient demain que leurs yeux pour pleurer face à une situation qui leur échapperait. 

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