Notre lettre 858 publiée le 12 avril 2022

MAIS QUI EST BERGOGLIO ?
UN ENTRETIEN AVEC JOSE ARTURO QUARRACINO

SECONDE PARTIE


Nous poursuivons dans cette lettre la publication de l'entretien accordé à Gloria TV par José Arturo Quarracino..


Gloria.tv - À propos de Bergoglio, tout le monde parle de péronisme...

José Arturo Quarracino - Le mythe selon lequel Bergoglio était un péroniste a été largement répandu, or cela n’est pas vrai. Il est exact que dès qu’il a été élu provincial de la Compagnie de Jésus en Argentine, il a entretenu des relations très étroites avec un groupe péroniste – la Garde de fer – au point de lui confier la direction et l’administration de l’Universidad del Salvador, lorsqu’il a décidé – avec le soutien du père Pedro Arrupe, le supérieur général – de confier celle-ci à des laïcs, tout en conservant un pouvoir de contrôle ultime. Cette expérience s’est très mal terminée, quelques années plus tard, car il était pratiquement impossible pour deux organisations – l’une politique, l’autre religieuse – de coexister dans le même environnement universitaire. C’est de cette expérience qu’est né le mythe selon lequel Bergoglio aurait été membre de ce groupe péroniste. Lorsque Bergoglio est entré en contact avec la Guardia de Hierro, il était déjà Provincial, avec le pouvoir que cela représentait pour de bon à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Eglise. Il était impossible dans ces conditions qu’il devienne militant dans une formation politique importante à cette époque.


Gloria.tv - Quelle est la réputation du péronisme au sein de l’Église argentine ?

José Arturo Quarracino - Le péronisme pâtissait et pâtit toujours d’une très mauvaise réputation au sein de l’Église, tant en Argentine qu’au niveau mondial. Et ce principalement en raison de très graves erreurs historiques commises par les deux parties, le péronisme et l’Église, qui ont abouti à une confrontation brutale en 1955, très habilement et subtilement planifiée et manipulée par la Grande-Bretagne. Pourquoi ? Le but était d’empêcher le succès d’un processus politique qui s’identifiait très clairement à la doctrine catholique dans son idéologie politique et dans son action : cela comprenait l’introduction de l’enseignement de la religion catholique dans les écoles publiques, la construction de séminaires dans plusieurs diocèses du pays, la revendication de l’œuvre missionnaire de l’Espagne catholique en Amérique, la tenue de congrès eucharistiques et la consécration de l’Argentine à la Vierge de Luján, etc. N’oubliez pas que l’épouse du président Perón, Eva Duarte de Perón, a été reçue par le pape Pie XII lors de sa tournée en Europe, et qu’elle a été accueillie avec une grande solennité, tandis que lui était manifestée la reconnaissance pour le travail que réalisait alors le gouvernement argentin.


Gloria.tv - Êtes-vous d’accord avec cette évaluation négative ?

José Arturo Quarracino - Non, et j’espère pouvoir expliquer pourquoi en quelques mots, car le sujet mériterait un développement plus large qu’il n’est possible de faire en ces quelques lignes. Permettez-moi de vous dire qu’historiquement, ce mouvement politique a exprimé la réalisation et la mise en œuvre des principes fondamentaux de la Doctrine sociale de l’Église, dont le fondateur du mouvement s’est inspiré pour son action politique, et qu’il a toujours revendiquée publiquement comme fondement et horizon de ses idées et de sa pratique politiques. Il suffit de lire le texte posthume de Juan Domingo Perón, qui constitue son héritage historique et politique (Modèle argentin pour le projet national), la prière-supplication qu’il a prononcée sur la Plaza de Mayo le 15 novembre 1953 en hommage à la Vierge de Luján, ou les discours de sa seconde épouse, Eva Perón, en Espagne en 1947, revendiquant le christianisme comme source et fondement non seulement de toute organisation sociale, mais aussi comme créateur de culture et de civilisation.


Gloria.tv - S’agissait-il d’une véritable piété ou d’une tactique politique ?

José Arturo Quarracino - Dans les deux cas, il s’agissait d’une véritable piété. Avant même de devenir président, Juan Perón était membre tertiaire de l’Ordre de la Miséricorde, une condition qu’il n’a jamais cachée et qu’il a toujours explicitement affirmée, à telle enseigne que les armoiries de l’Ordre de la Miséricorde étaient affichées à l’entrée de la maison qu’il habitait lorsqu’il était en exil à Madrid. Eva Perón, quant à elle, était tertiaire franciscaine et jusqu’à sa mort en juillet 1952, son confesseur fut le père Hernán Benítez, ancien prêtre jésuite, qui après sa mort ne s’est jamais lassé de parler de la foi chrétienne d’Eva Perón : une foi profonde et professée.


Gloria.tv - Que pensez-vous du péronisme ?

José Arturo Quarracino - Je vais vous raconter une expérience personnelle qui me permettra d’expliquer l’essence ou la substance chrétienne du péronisme. Perón est mort le lundi 1er juillet 1974. Quelques jours plus tard, je suis allé rendre visite à mon oncle, qui était à l’époque évêque d’Avellaneda, un diocèse voisin de l’archidiocèse de Buenos Aires. Il me raconta que ce jour-là, il était allé célébrer la messe dans la cathédrale du diocèse, et que l’église était pleine de fidèles comme pour un dimanche. Un de ses amis paroissiens avait noté une grande partie des paroles prononcées par mon oncle dans son homélie : des notes manuscrites qu’il m’a données à lire. La lecture de l’Évangile du jour était le passage de saint Matthieu dans lequel Jésus dit « J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire », et ainsi de suite. Commentant le texte, mon oncle déclara : « Aujourd’hui, nous pouvons être sûrs que l’âme du général Perón repose au ciel, car il a manifestement accompli ces paroles de l’Évangile. »

Si le péronisme n’avait pas existé, l’Argentine aurait presque certainement été ce que fut Cuba après 1959 : un satellite de l’Union soviétique. La présence du péronisme a empêché la prédication marxiste de s’enraciner dans la conscience du peuple argentin.


Gloria.tv - Votre oncle était-il péroniste ?

José Arturo Quarracino - Sur le plan personnel mon oncle n’avait aucune sympathie pour Perón, il était très méfiant à son égard. Lors de cette expérience que je viens d’évoquer, je lui avais demandé s’il pouvait me faire une copie du texte, mais il refusa : il reprit la feuille de papier et il la conserva par devers lui. Ce jour-là, il avait parlé en tant que prêtre célébrant le mystère de l’Eucharistie, et non en tant qu’évêque. Il appréciait beaucoup les aspects doctrinaux du péronisme, et à ses profondes racines chrétiennes-catholiques, mais il n’a jamais été péroniste.


Gloria.tv - Pourquoi votre oncle se méfiait-il de Perón ?

José Arturo Quarracino - Je lui ai posé la question à plusieurs reprises, mais il ne m’a jamais donné de réponses claires ou catégoriques. Il y avait plus que des soupçons : une réelle défiance, car il est certain que Perón a souvent agi avec une ruse très difficile à contrer, et qu’il a aussi commis quelques gaffes, comme celle de se laisser entraîner dans un conflit avec l’Église à partir de 1954.

Mais ce conflit l’opposait à certains membres de la hiérarchie épiscopale, jamais à la doctrine, ou à la foi profondément christique et mariale du peuple argentin.


Gloria.tv - Quel fut l’impact de Perón sur l’Argentine ?

José Arturo Quarracino - À ce propos, et pour ce qui est de savoir si le péronisme est « mauvais », je peux vous dire sans crainte de me tromper que, historiquement parlant, le péronisme a empêché l’Argentine, tout comme la majeure partie de sa population, de tomber dans les griffes du marxisme et du progressisme social-démocrate. Ceux-ci ne sont rien d’autre que le bras gauche du pouvoir réel qui a dominé l’Argentine depuis les débuts de son indépendance : la puissance financière anglo-américaine, que le pape Pie XI définissait déjà en 1931 comme l’impérialisme international de l’argent (Encyclique Quadragesimo anno).

Au-delà de la personne de Perón, le mouvement politique qu’il a créé et dirigé a représenté et continue de représenter la possibilité la plus forte et la plus concrète d’une praxis politique inspirée par une doctrine reconnue comme profondément chrétienne et profondément humaniste.


Gloria.tv - Comment Perón a-t-il su mettre cela en œuvre ?

José Arturo Quarracino - En effet, le péronisme a été et demeure la réponse de l’Argentine en vue de la création d’un système social et politique dans lequel l’épanouissement personnel s’accompagne en même temps de la réalisation du destin historique du pays, qui n’est autre que l’institutionnalisation d’une Communauté organisée où tous coopèrent à la réalisation du Bien Commun, qui doit être une réalité pour tous, et pas seulement pour une minorité.

Culturellement, le péronisme est l’expression d’un profond nationalisme culturel qui n’est pas du tout chauvin, mais qui s’efforce de rassembler le meilleur du monde de l’esprit, des idées et des significations de l’histoire culturelle de l’Occident, et de les intégrer à la spécificité du peuple argentin, qui a des racines indigènes, hispaniques et créoles.


Gloria.tv - Pourquoi le péronisme est-il sujet de controverse ?

José Arturo Quarracino - D’une part, c’est en raison de la confrontation historique sanglante de 1955, que j’ai mentionnée précédemment. N’oubliez pas que des catholiques ont affronté le péronisme, au cours de ces années là, les armes à la main, formant de véritables organisations de guérilla, similaires ou identiques à celles qui ont existé plus tard, dans les années 1960. N’oubliez pas non plus que des militaires ont bombardé le siège du gouvernement à Buenos Aires, en arborant le signe « Christus vincit ».

D’autre part, parce que du côté du péronisme, il y a vraiment eu aussi de très graves erreurs, comme celle de s’être laissé entraîner dans un conflit avec l’Église qui allait inévitablement mal finir pour les deux parties, pour le plus grand plaisir de l’impérialisme international de l’argent, qui n’a pas d’idéologie, mais qui est libéral, athée, marxiste ou progressiste, selon l’utilité tactique du moment. Rendez-vous compte que pendant 18 ans, ce pouvoir antinational et chrétien a dirigé l’Argentine, évinçant du pouvoir aussi bien le péronisme que l’Église, souvent de façon symbolique.

Le problème de fond est que l’on pense que le péronisme est ce que nous avons tous vu à la surface de la politique depuis 1983, année de la « restauration » de la démocratie, et ce jusqu’à ce jour. Mais en réalité cela n’aura été qu’une caricature grotesque de ce mouvement politique, même si d’honorables exceptions existent toujours.

Il s’agit d’un processus similaire, voire identique, à celui que subit actuellement l’Église, elle qui est aujourd’hui administrée par ceux qui sont aux antipodes de la véritable Église de Jésus-Christ, et qui flirtent avec les trafiquants d’êtres humains, avec les avorteurs du plus haut rang politique, avec la dégénérescence sociale financée par George Soros, et avec la dégradation humaine portée par le lobby homosexuel. C’est l’anti-christianisation du catholicisme, si je puis dire, menée à bien par ses principaux dirigeants.

Quelque chose de similaire, toutes proportions gardées, s’est produit avec le péronisme.


Gloria.tv - Le péronisme est parfois présenté comme le fait de dire à chacun ce qu’il veut entendre, de dire tout et le contraire de tout, de dire oui quand on veut dire non et vice versa… Est-ce cela, le péronisme ?

José Arturo Quarracino - Ce que vous décrivez est ce que j’appelle la « caricature grotesque » du péronisme. Ce qui a donné lieu à cette confusion, c’est que beaucoup croient qu’après son renversement en 1955 et jusqu’à son retour définitif en Argentine en 1973, Perón est allé parler à tout le monde parce qu’il est allé les chercher, alors qu’en réalité il recevait tous ceux qui voulaient lui parler. En réalité, il n’est jamais allé chercher personne ; en général, tout le monde est venu le chercher, surtout lorsque toutes les tentatives de gouverner le pays sans le soutien de Perón et du péronisme ont échoué politiquement. Et il est rentré au pays sans aucun désir de revanche ou de vengeance.


Gloria.tv - Avez-vous participé vous-même au péronisme ?

José Arturo Quarracino - Oui. Lorsque Perón est rentré en Argentine, j’avais 19 ans, et j’avais commencé à militer dans le groupement dont Bergoglio s’est rapproché. L’une des phrases qui m’avait le plus frappé à l’époque, de la bouche de Perón, était que « pour faire une révolution, il faut du sang ou du temps ; si l’on veut économiser le sang, il faut utiliser le temps, et de même pour économiser le temps, il faut être prêt à utiliser le sang ». Depuis son retour, Perón ne nous a jamais indiqué – que ce soit aux militants ou aux Argentins – la voie du sang, de la violence ou de la lutte armée. Mais il est vrai que certains, en son nom, ont eu recours à ces moyens qu’il avait lui-même toujours écartés.

À partir de 1976, en raison du coup d’État qui eut lieu cette année-là, j’ai été contraint de « prendre des vacances » en matière d’activité politique, et ce jusqu’au début du nouveau millénaire. Mais pas dans les structures traditionnelles, mais selon des modalités nouvelles qui permettent de maintenir la position doctrinale et idéologique du mouvement politique, fidèle à sa conception chrétienne et humaniste, comme je l’ai dit précédemment.


Gloria.tv - Le péronisme est-il aujourd’hui plutôt un parti socialiste « éveillé » ?

José Arturo Quarracino - Non, pas du tout. Ce qui s’affiche aujourd’hui à la surface politique comme « péronisme » est une caricature et une dégradation du péronisme, et n’a rien à voir avec lui d’un point de vue doctrinal, culturel et spirituel. C’est un progressisme de très bas niveau, « berreta » comme on dit en Argentine : quelque chose de faux, de fade, de méprisable. C’est la déformation grotesque du péronisme, une manœuvre qui a été très profitable jusqu’à présent aux ennemis de l’Argentine : le pouvoir financier mondialiste.


Gloria.tv - Bergoglio était-il péroniste alors qu’il était archevêque de Buenos Aires ? Quelles étaient ses relations avec le gouvernement ?

José Arturo Quarracino - Comme je vous l’ai déjà dit, il n’a jamais été péroniste, c’était un jésuite typique. Il est vrai qu’il a flirté avec le monde péroniste, mais il a également flirté avec les mondes libéral et progressiste, par des relations très éclectiques et relâchées, toujours dans la mesure où elles pouvaient représenter un gain politique ou économique pour lui. Il s’est toujours bien entendu avec les gouvernements locaux de la ville de Buenos Aires, mais très mal avec le président Kirchner, et très bien avec son épouse qui lui a succédé, Cristina Kirchner, au point qu’il a œuvré politiquement pour lui faire rencontrer George Soros, en même temps qu’il demandait à ses interlocuteurs politiques de « prendre soin de Cristina ».


Gloria.tv - Récemment, Henry Sire (Le Pape dictateur) a accordé une longue interview à Gloria.tv. Que pensez-vous de ce livre ?

José Arturo Quarracino - Lorsque le livre est sorti, j’ai pu en lire plusieurs extraits, mais je n’ai jamais pu tenir le livre entier entre mes mains. Cela dit, j’ai été surpris par le niveau de connaissance et de précision dont l’auteur fait preuve dans les données qu’il présente dans le livre. Et j’ai également été frappé par le courage dont il a fait montre en le publiant, car il a fait une action désintéressée pour le bien de tous : « jugó una patriada » comme on dit chez nous.


Gloria.tv - Et son interview sur Gloria-tv ?

José Arturo Quarracino - J’ai eu le privilège de lire le contenu de l’interview à l’avance, grâce à la gentillesse de Gloria.tv, et je suis en total accord avec ce qu’a dit Henry Sire, même si je ne suis pas d’accord avec sa vision de Bergoglio comme péroniste, pour toutes les raisons que j’ai exprimées ci-dessus.


Gloria.tv - Comment voyez-vous les choses ?

José Arturo Quarracino - En ce sens, pour comprendre Bergoglio et son pontificat, il faut tenir compte de ses liens étroits avec la Maison Rothschild, à travers le Conseil pour le capitalisme inclusif. Ce que Sire et beaucoup d’autres attribuent à Bergoglio comme péroniste vient en réalité des Rothschild, en particulier de la baronne Lynn Forester, troisième épouse de Sir Evelyn de Rothschild : le concept d’inclusion, le cri des pauvres et le cri de la Terre Mère, etc., autant de concepts qui sont sur les lèvres du monde oligarchique et ploutocratique que cette dame représente.


Gloria.tv - Quel mal y a t-il à cela ?

José Arturo Quarracino - À mon humble avis, pour comprendre ce qu’a fait Bergoglio depuis le début de son pontificat – à commencer par le fameux Synode sur la famille et l’exhortation Amoris Laetitia – il faut chercher l’explication dans son alliance avec la Maison Rothschild, devenue explicite et publique le 8 décembre 2020, lors de cette fameuse réunion à Rome, où, photo à l’appui, Bergoglio montre le visage sinistre et sec qu’il affiche habituellement quand il est gêné. N’oubliez pas que la baronne Lynn Forester a déclaré lors d’un entretien que le projet qu’elle a promu et concrétisé – le Conseil pour le capitalisme inclusif – est une prose mise en musique par la présence de Bergoglio. En termes profanes, elle disait en réalité que Bergoglio, en tant que pape, est le bouffon de son groupe ploutocratique qui prétend donner un visage « humain » au capitalisme, parce qu’ils sont conscients que pendant qu’ils devenaient hyper-milliardaires, 90 % de la population mondiale n’a obtenu que quelques miettes de la richesse que nous produisons tous.


Gloria.tv - Pas de péronisme, donc ?

José Arturo Quarracino - Lire Bergoglio avec une clef péroniste conduit à l’erreur. Pour comprendre le désastre qu’il a causé et dans lequel il persiste, il faut lire Bergoglio selon son lien avec le projet inclusif des Rothschild, qui en retour provoque l’éradication et l’élimination de la mémoire historique, culturelle et spirituelle de l’Église et de l’humanité, c’est-à-dire de la Tradition culturelle de l’histoire universelle, humaniste et chrétienne, dont le catholicisme a été la matrice et la forge.


Gloria.tv - Si le « péronisme » de François est une farce, qui est-il vraiment ?

José Arturo Quarracino - Bergoglio n’est pas un péroniste, c’est un jésuite intégral sur toute la ligne, mais dont il est remarquable que le caractère jésuite ne rayonne pas du tout dans son munus petrinum. C’est un opérateur politique, évidemment, non point selon sa fonction de Vicaire du Christ – titre auquel il a renoncé dans l’édition 2020 de l’Annuaire pontifical parce qu’il le considère comme une chose du passé – mais à partir de la praxis typique du jésuitisme dont il a conservé les formes et les concepts sans son contenu concret, sans l’âme ignacienne.


Gloria.tv - Que signifie cela ?

José Arturo Quarracino - Ce n’est pas un hasard si le Général de la Compagnie de Jésus, le Vénézuélien Arturo Sosa, a dit en substance qu’étant donné qu’à l’époque de Notre Seigneur il n’y avait pas de magnétophones, nous ne savons pas ce qu’il a dit réellement, mais plutôt ce que certains disent qu’il a dit, dans une langue qui n’est pas la nôtre, et que nous devons donc faire preuve de discernement pour savoir ce que Jésus a voulu dire en réalité. Dans un entretien peu diffusé qu’il a accordé à un site Internet italien, Bergoglio a déclaré que, pour prendre ses décisions, il se fiait « à son instinct et à l’Esprit Saint », laissant de côté l’Écriture Sainte, la Tradition et le Magistère.


Gloria.tv - Les activistes médiatiques de l’oligarchie adorent Bergoglio…

José Arturo Quarracino - Ce n’est pas un hasard si la grande presse internationale et mondiale – ennemie de l’Église et du christianisme – l’a identifié d’emblée comme le grand révolutionnaire, celui qui allait transformer une Église rétrograde et réactionnaire, tandis que les fidèles catholiques eux-mêmes accordent de moins en moins d’importance à sa personne, comme on a pu le constater jusqu’au début de 2020, avec une fréquentation des audiences du mercredi et de l’Angélus le dimanche quatre fois moins importante que celle observée lors des pontificats de saint Jean-Paul II et de Benoît XVI.


Gloria.tv - N’exagérez-vous pas lorsque vous dites que Bergoglio collabore avec les ennemis de l’Église ?

José Arturo Quarracino - Tout est visible comme en plein jour. En réalité, Bergoglio a exercé son pontificat en tant qu’opérateur politique, plutôt qu’en pasteur des âmes et vicaire d’un Pouvoir supérieur. Voici un exemple que j’ai déjà évoqué et que je vais maintenant détailler : à un certain moment en 2014, il a œuvré, par le biais d’un opérateur politique argentin, pour que la présidente de l’époque, Cristina Kirchner, rencontre George Soros, chose qui s’est effectivement produite quelques mois plus tard. Mais il n’a jamais montré d’intérêt et il n’a jamais levé le petit doigt lorsqu’un médecin argentin a été condamné en 2018 par un tribunal provincial (Rio Negro) pour avoir refusé de pratiquer un avortement – illégal, mais dont le protocole avait été établi de fait par une résolution ministérielle. Ce médecin avait sauvé deux vies : celle d’une jeune femme qui avait tenté d’avorter et qui était sur le point de mourir, et celle de son enfant qui a survécu à la tentative. Il n’a jamais non plus adressé un seul mot d’encouragement et d’accompagnement aux mouvements pro-vie qui luttaient pour empêcher la légalisation du meurtre prénatal. En revanche, il s’occupait d’envoyer des messages et des mots d’encouragement aux dirigeants politiques qui faisaient l’objet de poursuites pénales et civiles, parce qu’ils étaient progressistes, bien qu’adversaires ou ennemis de l’Église.

Lorsque le président argentin Alberto Fernández s’est rendu à Rome un mois et demi après son entrée en fonctions pour rencontrer Bergoglio, tout le monde se souvient de la joie dont ils ont tous deux fait montre au cours de cette rencontre chaleureuse, sans qu’un seul mot ne soit prononcé sur la décision du président argentin de faire avancer la légalisation de l’avortement. Mgr Marcelo Sánchez Sorondo a même célébré la messe à l’autel de la chapelle où reposent les restes de saint Pierre et lui a permis de recevoir la communion, sachant qu’il était déterminé à faire adopter la légalisation de l’avortement.

Pensez aussi aux dernières visites qu’il a eues du président Joe Biden et de la démocrate Nancy Pelosi, tous deux ultra-avorteurs : il les a reçus avec joie comme des amis intimes, accueil qu’il n’a réservé à aucun leader pro-vie, qu’il soit italien ou étranger.

Pour moi le comble de cette collaboration a été atteint lors qu’il a livré Église catholique en Chine à la dictature qui dirige ce pays, en la condamnant à disparaître.


Gloria.tv - On raconte que le cardinal Bergoglio avait des secrétaires qui avaient l’habitude d’assister à la messe à la Fraternité Saint Pie X. Bergoglio a également semblé défendre la Fraternité Saint Pie X. Comment cela peut-il cadrer avec l’image du François libéral ?

José Arturo Quarracino - C’est chez lui une caractéristique de toujours : jouer avec les contraires, en passant d’un extrême à l’autre : un jour, il est orthodoxe, il condamne en paroles l’avortement devant un groupe de médecins catholiques ou devant des microphones, en le qualifiant d’exécution par un tueur à gages ; le lendemain, il reçoit Emma Bonino et fait son éloge, et fait de même pour le président argentin, avorteur revendiqué qu’il autorise à participer à une messe célébrée sur l’autel qui est près de l’urne contenant les restes de saint Pierre.


Gloria.tv - Qui peut comprendre cela ?

José Arturo Quarracino - Cela a toujours été le jeu de Bergoglio, un jeu de ruse et non de sagesse, parce que c’est un moyen qui lui permet de ne pas être catalogué et en même temps de garder l’initiative. Bien qu’il s’agisse en fin de compte d’une ruse au vol court, comme celui des poules.


Gloria.tv - Henry Sire qualifie de « grand mystère de la carrière de Bergoglio » le fait qu’il ait été le bras droit de votre oncle, le très catholique cardinal de Buenos Aires Quarracino, mais qu’il soit ensuite devenu la coqueluche du groupe de Saint-Gall. Pouvez-vous éclaircir ce mystère ?

José Arturo Quarracino - C’est du jésuitisme pur : pour échapper à l’exil que lui impose la Compagnie, il s’accroche à Quarracino, conservateur et « rétrograde » selon ses ennemis ; lorsqu’il a pu exercer pleinement la fonction d’archevêque, il a commencé à déployer son côté « populaire » et humble, à se défaire de l’étiquette de conservateur et à se rapprocher de ces positions progressistes qu’affectionnait le groupe de Saint-Gall.


Gloria.tv - Le jésuitisme ? Voulez-vous dire la duplicité ? Deux visages ?

José Arturo Quarracino - Rendez-vous compte que Bergoglio a commencé son pontificat en parlant de la mondanité spirituelle ou de la spiritualité mondaine comme étant le plus grand problème affectant l’Église aujourd’hui. Et qu’il a fini par faire de l’Église une organisation mondaine, comme celle qu’il promeut frénétiquement aujourd’hui, avec la basilique Saint-Pierre comme musée, les délires idéologiques de la doctrine LGTB comme composante de la doctrine « chrétienne », la Tradition comme élément abstrait et fondamentaliste de la vie de l’Église, l’octroi de la citoyenneté chrétienne à une divinité païenne (Pachamama), etc.

C’est le jésuitisme, au sens où vous l’entendez, qui conserve la forme de ce qui est « jésuite » mais sans l’essentiel, qui est d’être un « soldat de Jésus-Christ », parce qu’au fond il n’y a plus de foi dans le Christ. C’est une « Compagnie de Jésus » mutée ou convertie en une « Compagnie de l’Iscariote », et qui en conserve la forme originale, sans le contenu. Une « Compagnie » dont l’une des vedettes est un prêtre ouvertement homosexuel et apologiste du « monde homosexuel » : il occupe un poste au Vatican.


Gloria.tv - En tant que pape, François s’est révélé être très pro-homosexuel. Cela était-il visible lorsqu’il était cardinal ?

José Arturo Quarracino - Pour autant que je sache, l’attitude gay-friendly de Bergoglio n’a jamais été évidente et visible, ni en tant que jésuite, ni en tant qu’évêque. Elle n’était pas non plus très visible alors qu’il était cardinal, car cela aurait pu rendre impossible son élection pontificale par le collège des cardinaux. Cependant, on a connu des cas de prêtres ayant de tels comportements qui ont toujours pu compter sur la protection discrète de Bergoglio. Il n’a agi ouvertement que lorsqu’il a accédé à la Chaire de Pierre, donnant alors un spectacle aberrant en offrant refuge et protection politique et cléricale à un délinquant notoire comme Mgr Gustavo Zanchetta. 


Gloria.tv - Beaucoup ont suggéré que François veut des collaborateurs susceptibles d’être soumis au chantage, et qui soient contrôlables. Disposez-vous d’éléments permettant de confirmer cette hypothèse ?

José Arturo Quarracino - Malheureusement, oui, et à tous les niveaux. A quoi s’ajoute le fait qu’il s’est toujours entouré de personnalités médiocres, soumises et serviles. Parce que le style de gouvernance de Bergoglio, plutôt que d’être dictatorial comme Henry Sire l’a décrit, est typiquement despotique : il n’admet ni la dissension ni l’indépendance de jugement.


Gloria.tv - Comme à l’époque où il était Provincial des Jésuites d’Argentine ?

José Arturo Quarracino - On a beaucoup parlé de la confrontation de Bergoglio avec les Jésuites après la fin de son mandat de Provincial des Jésuites. Ce que peu, voire très peu de gens ont raconté, peut-être pour des raisons de discrétion et de décorum, c’est que ceux qui l’ont affronté le plus vivement étaient précisément ceux qui avaient été ses collaborateurs ou ses compagnons alors qu’il était à la tête de l’Ordre. Certains d’entre eux avaient été pour lui des amis très proches, qui le respectaient et l’aimaient beaucoup.


Gloria.tv - Pourquoi donc cette confrontation s’est-elle produite alors ?

José Arturo Quarracino - On ne l’a jamais su. On savait qu’il s’agissait de personnes sérieuses, avec leur personnalité, qui n’étaient pas susceptibles d’être manipulées ou sujettes au chantage.


Gloria.tv - Une question personnelle : vous avez eu trois enfants, et deux d’entre eux sont morts. Que diriez-vous aux parents qui connaissent un sort aussi terrible ?

José Arturo Quarracino - Par le sacrement de l’ordre, le prêtre devient « un autre Christ », tandis que par le sacrement du mariage, nous autres laïcs devenons les collaborateurs de Dieu dans ce miracle qu’est le don de la vie. Comme le dit le Psaume 127, la bénédiction et l’héritage dont Dieu nous comble dans la vie passent par les enfants. Perdre un fils à l’âge de 28 ans, un être extraordinaire et plein de bonté comme l’était notre Juan José durant sa vie, a été pour ma femme et moi le plus dur des coups que nous avons eu à affronter. Mais grâce à la foi qui nous a été inculquée et que nous avons tous deux su cultiver et faire grandir tout au long de notre vie, mon épouse a pu se serrer contre la Vierge et « participer » à sa douleur au pied de la croix, lorsque le corps inerte de Notre Seigneur a été descendu de ce bois. Pour ma part, j’ai pu ressentir une douleur semblable à celle que Dieu a éprouvée en tant que père lorsqu’il a vu son Fils sur le chemin de la mort, mais qu’il s’est abstenu de l’en empêcher parce qu’il savait que c’est ainsi que nous, les hommes, pourrions atteindre la rédemption, après la résurrection de Notre Seigneur.

C’est en me submergeant dans cette douleur que j’ai pu supporter l’énorme choc de trouver mon fils mort sur le seuil de la porte de ma maison, par sa propre volonté, parce qu’il avait perdu tout espoir de pouvoir faire face à une maladie qu’il n’avait jamais pu maîtriser. Alors que je souffrais à ce moment-là de l’immense douleur de le voir parti, Dieu m’a accordé la grâce de la consolation de « partager » sa douleur de voir son Fils partir vers la mort, me permettant de percevoir avec les yeux de la foi le monde dans lequel nous allons après avoir quitté ce monde, un monde dans lequel notre fils vit entouré des saints qui vivent avec lui dans l’éternité. Comme je l’ai appris de celui qui était alors le cardinal Joseph Ratzinger, le secret de la vie chrétienne consiste à transformer un mal que nous subissons en un bien qui porte du fruit pour les autres, parce qu’en définitive, tout ce qui nous arrive dans la vie est grâce, lorsque nous vivons pleinement la foi comme le Seigneur nous le demande, avec dignité et sans aucun accommodement.

Le départ de mon fils a entraîné pour moi le besoin de lui rendre hommage chaque jour, en rayonnant l’amour et la bonté qu’il offrait à tous ceux qui l’entouraient, dans l’espoir que nous pourrons nous rencontrer définitivement au ciel et nous fondre dans une étreinte éternelle, après avoir accompli sur terre la mission à laquelle Dieu m’a appelé, pour sa plus grande gloire et son plus grand honneur.


[ texte original : https://gloria.tv/post/2xk9HAobWJNw1MQgCwSjqgqyB ]

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