Notre lettre 679 publiée le 29 janvier 2019

BILAN 2018 DE L'APPLICATION DU MOTU PROPRIO SUMMORUM PONTIFICUM EN ITALIE

Marco Sgroi a présenté une importante communication sur la situation actuelle des fidèles attachés à la forme extraordinaire en Italie lors des 5ème journées Summorum Pontificum qui se sont tenues à Rome le 26 octobre 2018. Nous lui avons demandé de répondre à quelques questions pour nous éclairer sur ce sujet.


1- Marco Sgroi, pourriez-vous nous dire ce que représentait la messe traditionnelle en Italie au moment de la publication du motu proprio SP ?

Marco Sgroi - Il est assez difficile de vous répondre avec précision mais seulement d'une manière approximative car le monde de la Tradition en Italie avant le motu proprio Summorum Pontificum était très peu développé : selon moi, entre 20 et 30 messes traditionnelles régulières étaient célébrées avant le MP de 2007, mais selon des informations que m'ont fournies les animateurs de la fédération internationale Una Voce il y avait surtout des messes célébrées occasionnellement et peu ou pas de communautés organisées en dehors des grandes villes.


2 - Et quelle est la situation aujourd'hui ?

Marco Sgroi -Il m'est plus facile de vous répondre pour évoquer la situation actuelle car, comme animateur au service de la Coordination Nationale Summorum Pontificum ( CNSP ), j'ai des amis un peu partout et je puis donc vous répondre assez précisément. Pour être exact, je connais, à la fin octobre 2018, un nombre de 123 chapelles ou églises au sein desquelles se déroulent en Italie des messes selon la forme extraordinaire dans le cadre du motu proprio Summorum Pontificum. 73 de ces chapelles proposent à leurs fidèles une messe chaque dimanche et fête et 50 d'entre-elles n'offrent que des messes en semaine ou des messes dominicales irrégulières. Ce chiffre peut vous sembler faible mais au regard de ce qu'il était il y a 11 ans il est vraiment extraordinaire et représente un accroissement de plus de 270 % ! Il faut ajouter à cela les chapelles où sont célébrées des messes par la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X qui, d'après mes comptages, étaient au nombre de 15 ; mais des amis m'ont informé que ce chiffre seraient aujourd’hui plutôt de l'ordre de 20.  Pour y voir plus clair, et aider les fidèles qui souhaitent les rejoindre, nous avons mis en place un site et une carte interactive pour faciliter la communication http://www.summorumpontificum.org/le-sante-messe-in-italia/. Il y a aussi un agenda, où nous publions les célébrations occasionnelles ou spéciales http://www.summorumpontificum.org/agenda/.


3 - Qui est à l'origine de cette croissance ?

Marco Sgroi -Ceux sont essentiellement les fidèles qui sont à l'origine de cet accroissement. Ceux sont eux qui, dans la plupart des cas, ont sollicité leur curé ou parfois leur évêque pour obtenir des célébrations selon l'usus antiquor. Il y a quelques cas où ce sont des prêtres eux-mêmes qui sont à l'origine de ces célébrations, mais dans ces cas ils étaient presque toujours entourés de fidèles qui le souhaitaient et donc, même dans ces cas-là, les fidèles ne sont pas étrangers à l'émergence de ces communautés.


4 - Cette progressions fut-elle facile à obtenir ?

Marco Sgroi -Cela varie d'un lieu à un autre mais, si dans certains lieux il fut assez aisé d'obtenir satisfaction, dans beaucoup d'autres les choses furent difficiles, parfois très difficiles et longues. Ce qui explique qu'aujourd'hui 50 de ces chapelles n’offrent pas encore une messe dominicale régulière alors que dans ces chapelles il y aurait partout un nombre suffisant de fidèles pour y assister.


5 - Et qui sont les desservants de ces chapelles " Summorum Pontificum" ?

Marco Sgroi -Sur les 123 chapelles que j'ai dénombrées, 15 sont desservies par des prêtres de communautés dites “ Ecclesia Dei” et 85, c’est-à-dire l'immense majorité, sont desservis par des prêtres diocésains. Ces prêtres diocésains étaient au départ parfois des prêtres qui ignoraient tout de cette liturgie. Il y eu même des prêtres qui furent nommés et agirent pour décourager les fidèles mais le temps passant la situation s'est considérablement améliorée et aujourd'hui on peut dire que presque tous les prêtres qui animent nos chapelles sont de bons prêtres bienveillants désireux de répondre loyalement à la demande des fidèles.


6 - Comment se répartissent ces 123 célébrations du nord au sud de l'Italie ?

Marco Sgroi -La grande majorité des célébrations - 96 - se déroulent au nord de Rome et seulement 27 se déroulent à Rome, au sud et dans les îles. Cette disparité s’explique pour deux raisons.

La première est que c'est d'abord dans le nord de l'Italie que des fidèles se sont regroupés pour demander et obtenir la messe alors que dans le sud le mouvement fut plus tardif.

La seconde est que, dans le nord, les évêques furent plutôt bienveillants alors que pendant longtemps les évêques du sud furent plus réticents.

Enfin il se peut que le fidèles du sud se soient montrés plus "obéissants", plus dociles, face à leurs pasteurs alors que dans le nord les fidèles furent plus naturellement frondeurs.

Mais aujourd'hui les choses sont en train de changer et je pense que dans les prochaines années la situation va s'équilibrer et être identique au nord comme au sud surtout lorsque les demandeurs "en instance" seront entendus.


7 - Y-a-t-il beaucoup de groupes de demandeurs qui n'ont pas encore obtenus satisfaction ?

Marco Sgroi -Bien sûr qu'il y en a, mais il vaut mieux ne pas les nommer pour éviter de faire obstacle à leurs demandes. Il y a aussi tous ceux qui n'ont pas obtenus "le minimum catholique", c’est-à-dire au moins la messe dominicale régulière ce qui, je le rappelle, représente 73 chapelles !


8 -Selon vous y-a-t-il un potentiel important de fidèles qui désirent assister à la messe traditionnelle en Italie ?

Marco Sgroi -C'est difficile à dire mais nous avons l'impression que plus la confusion se développe dans l’Église plus il y a de fidèles, mais aussi de prêtres et de religieux, qui se tournent vers les communautés traditionnelles. Aussi est-il vraisemblable que d'ici quelques années il y a aura des communautés Summorum Pontificum dans toutes les villes d'Italie.


9 - Vous parlez plus volontiers de communautés traditionnelles que de chapelles traditionnelles ?

Marco Sgroi -Evidemment, car les fidèles n'aspirent pas seulement à la messe mais à leur participation entière à la vie chrétienne. C'est pourquoi on voit désormais autour des chapelles se développer des cours de catéchisme et surtout tout ce dont ont besoin les fidèles : confessions, baptêmes, mariages, funérailles, confirmations, première communion et aussi de plus en plus d'écoles parentales qui souvent se créent à l'ombre des communautés qui, de ce fait, deviennent de plus en plus comme de vraies paroisses classiques.


10 - Vous avez évoqué l'abbaye de Norcia et les bénédictins de Villatella dans votre communication ?

Marco Sgroi -Oui le rôle des communautés religieuses est essentielle pour nous car les fidèles qui sont attachés à la messe traditionnelle le sont rarement pour des raisons uniquement culturelles ou esthétiques mais bien pour des raisons spirituelles et doctrinales. Or, pour ces fidèles et leurs familles qui aspirent à une plus grande vie spirituelle, la fréquentation des communautés religieuses est d'un grand réconfort et d'un grand secours.


11- Avez-vous l'impression que vos communautés génèrent de vocations sacerdotales et religieuses ?

Marco Sgroi -C'est une certitude que depuis quelques années nous voyons de plus en plus de jeunes hommes qui désirent s'engager vers le sacerdoce catholique. C'est un mouvement en pleine croissance et déjà quelques garçons ont rejoint les instituts traditionnels comme l’Institut du Christ-Roi ou la fraternité Saint-Pierre. Mais le fait qu'il n'existe pas un séminaire italien en Italie (le séminaire de Gricigliano est très important, cela va sans dire, mais il donne ses cours en français) n'a pas permis pour l'instant d’accélérer ce mouvement : ce sujet est pour nous très important et nous prions pour que bientôt cette opportunité d’accéder au sacerdoce traditionnel soit possible en Italie et en italien.


12 - Vous avez évoqué le catéchisme ?

Marco Sgroi -C'est une question essentielle : si on est catholique, on a naturellement le désir de transmettre la pleine Foi catholique à ses enfants. Or, en Italie, aujourd'hui le catéchisme est pauvre et n'enseigne pas grand-chose de la Foi et des vérités Catholique. Voilà pourquoi petit à petit nous développons au sein des communautés des groupes d'enseignement d'un catéchisme riche et complet. Il arrive même que cet enseignement d'un catéchisme traditionnel entraîne de nouvelles familles à nous rejoindre.


13 - Un mot enfin sur la coordination Nationale Summorum Pontificum

Marco Sgroi -Bien sûr que chaque groupe est un peu jaloux de ses particularités et de ses spécificités ; cela la coordination veut le respecter soigneusement. Mais le plus grand nombre des groupes italiens souhaitent, dans la confusion actuelle, pouvoir s'appuyer sur d'autres groupes aux préoccupations semblables. De plus, cela nous permet d'aider les groupes qui émergent… C'est ainsi que s'est constitué la CNSP car le sentiment général en Italie aujourd'hui est celui du désir d’appartenir à un mouvement d'ensemble, de fond, ce que nous appelons avec conviction le Peuple Summorum Pontificum.


Marco Sgroi est né en 1963, il est aujourd'hui avocat et vit à Piacenza.


 

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